Un nouveau regard sur Charles Aznavour… par le biais de son propre regard. Celui, à la fois perçant et très humain, qu’il portait sur le monde, la vie, l’amour, sa carrière… Tel est le propos du documentaire réalisé par Marc Di Domenico.
Durant des décennies, Charles Aznavour a fait l’actualité. L’actualité musicale, cinématographique, télévisuelle… et parfois l’actualité tout court. Et comme le dit malicieusement la voix de l’acteur Romain Duris au début du documentaire, l’observation ne s’est pas faite à sens unique. « Vous m’avez vu, mais ce que vous ne savez pas, c’est que moi aussi, je vous ai vus… »
Les regards de Charles
Mais revenons-en à ce « regard » de Charles. Dans ce film fascinant, il est pluriel. Il y a d’abord un regard presque ethnographique avec ces images en plans larges de voyages en Afrique, en Amérique latine, en Asie… On ressent une volonté de filmer les peuples, les gens, savourant la communication silencieuse enclenchée par le seul regard d’une caméra braquée sur eux. Aznavour le dit dans le documentaire : la misère qu’il percevait en filmant des enfants dans la rue le renvoyait à celle qu’il avait connue durant sa propre jeunesse. Une misère rendue indolore par l’amour que ses parents lui portaient, à lui et à sa sœur Aïda. « On n’avait rien. On avait tout. Je me demande s’ils ont des parents comme ça. »
Il y a enfin le regard de l’homme sur lui-même, sa carrière, le succès. Un regard d’une sincérité crue, sans complaisance. Presque celui d’un enfant grandi trop vite et qui retourne la caméra contre lui pour vérifier que ce qui lui arrive est bien vrai, que c’est bien lui, le petit Arménien disgracieux dans lequel personne ne misait un kopeck, qui côtoie les grandes stars de son temps… « J’existe. Je me filme, donc j’existe. » Puis le regard de l’homme qui goûte au succès et assume pleinement les plaisirs matériels qui y sont liés. « Je gagne beaucoup d’argent et ne m’en cache pas », assène le narrateur sur des images de piscine luxueuse.
Il y a enfin les derniers mots du documentaire qui nous sont adressés, et qui nous serrent un peu le cœur quand on se souvient que Charles Aznavour n’a pas eu le temps de voir le résultat de ce travail captivant. Ce livre qui s’est refermé, c’est un peu le nôtre aussi.
La fiche
Genre : documentaire
Réalisateur : un film de Charles Aznavour réalisé par Marc Di Domenico
Pays : France
Durée : 1H23
Sortie : France
Distributeur : Rezo Films
Synopsis : En 1948, Edith Piaf offre sa première caméra à Charles Aznavour, une paillard qui ne le quittera plus. Jusqu’en 1982, Charles filmera des heures de pellicules qui formeront le corpus de son journal filmé. Aznavour filme sa vie et vit comme il filme. Partout où il va, sa caméra est là, avec lui. Elle enregistre tout. Les moments de vie, les lieux qu’il traverse, ses amis, ses amours, ses emmerdes. Quelque mois avant sa disparition il entame avec Marc di Domenico le dérushage de ses films. Il décide alors d’en faire un film, son film.
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